Du 12 au 14 juin : Medellín et Guatapé
- Morgan et Marie
- 21 juin 2019
- 8 min de lecture
Dernière mise à jour : 24 juin 2019
Nous partons de Pereira vers 23h pour rejoindre un bus qui n’a pas l’air trop climatisé. Ouf !
Nous arrivons le 12 juin vers 4h du matin à Medellín, en avance pour une fois (ce qui ne nous arrange pas). Nous attendons dans la gare routière comme des sans-abris que nous sommes car nous ne pouvons pas arriver si tôt à l’hôtel. Nous sommes subjugués par toutes les lumières qui scintillent dans la nuit et nous intégrons très vite la grandeur de la ville, ce qui nous change des dernières petites villes visitées !
Nous prenons un taxi vers 6h qui nous amène à notre hôtel situé dans le quartier sûr de Poblado, mais personne n’est disponible pour nous ouvrir. La personne à l’interphone nous demande d’aller attendre dans une auberge à côté. Le gérant, très gentil nous offre un café et nous laisse utiliser le wifi.
A 7h, nous pouvons monter dans l’immeuble partagé en différentes chambres. La nôtre est actuellement occupée par un couple de français que l’on avait croisés dans notre auberge à Otavalo ! Décidément, nous faisons tous le même circuit.
La matinée ne sera pas très productive. Nous petit-déjeunons, nous reposons sur la super terrasse aménagée, rencontrons et discutions avec le français trentenaire qui tient l’immeuble, faisons une machine et partons faire quelques courses.

Après mangé, nous faisons également connaissance avec un autre couple français quarantenaire également en tour du monde. Nous parlerons donc longuement avec eux durant notre séjour !
Pour l’après-midi, nous nous sommes inscrits pour le free walking tour du centre-ville. Comme son nom l’indique, il s’agit d’un tour « gratuit » (on laisse un pourboire à la fin) effectué par un guide certifié.
Nous testons le métro d’ici : grand, propre, facile d’utilisation, économique.
Nous rejoignons Julio, le guide, et une trentaine de touristes pour 4h d’explications en 10km de marche dans la ville.
Tout en parfait anglais, il nous explique en premier lieu l’histoire très sombre de cette ville, sans jamais mentionner le nom de Pablo Escobar, sujet tabou pour les locaux qu’il ne veut pas froisser s’ils nous entendaient. Tel Voldemort, il sera nommé « the one who must not be named ».
[Petit point historique et géographique : Medellin est la capitale du département d’Antioquia. Elle est située dans une vallée de la Cordillère des Andes, avec un climat doux mais plutôt pluvieux.
Lorsque les Espagnols débarquèrent au début du 16ème siècle, ils cherchèrent ici de l’or, en vain. Mais la situation géographique leur plut et ils s’établirent ici, parmi les indigènes.
C’est Pablo Escobar qui, à partir des années 80, en fit une ville à la très mauvaise réputation, base de son cartel de cocaïne.
La suite, tout le monde la connaît : il commence à faire assassiner ses ennemis (concurrents comme le cartel de Cali, traîtres et policiers), puis des membres du gouvernement, qui s’opposent à son trafic. La guerre des cartels fera plus de 45000 morts (dont beaucoup d’innocents) et donna le titre de « ville la plus dangereuse du monde » à Medellin dans les années 90.
Depuis la mort d’Escobar en 1993, d’autres cartels, moins importants, ont pris le relai mais depuis quelques années, Medellín se relève petit à petit.
Julio nous explique qu’aujourd’hui, il existe 4 groupes de personnes :
- ceux qui détestent le narcotrafiquant pour les crimes qu’il a commis. Julio en fait partie car, quand il avait 5 ans, il a été traumatisé par une bombe qui a touché son quartier
- les jeunes qui l’adulent, entre autres à cause de la série « Narcos », et qui voient en lui une personne issue d’un milieu social ordinaire qui a su prendre du pouvoir et devenir riche en un clin d’œil (plus de 30 milliards de dollars amassés durant sa « carrière »)
- les anciens qui voient en lui un « sauveur ». Pablo a en effet utilisé une partie de sa fortune pour construire des écoles, hôpitaux, routes et aider les habitants des bidonvilles de Medellin
- ceux qui n’ont pas d’avis.
Aujourd’hui, même si l’histoire de la violence est encore toute fraîche, un plan social a été mis en place dans la ville pour la faire sortir de l’ombre. Construction du métro aérien et ligne de tramway (les seuls du pays), d’universités, de musées, de places symboliques, etc. permettent de redynamiser la ville et d’attirer des touristes de toute part.]
Tout le long du walking tour, Julio notera sur 5 le niveau de criminalité et de vigilance qu’il faut avoir dans tel ou tel lieu. Heureusement qu’on est en grand groupe !
Nous commençons la visite par l’ancienne gare du 19ème siècle, le trafic ferroviaire permettant le transport de marchandises (et surtout de café) dans le pays.
Nous continuons vers la place du centre administratif Alpujarra, sa grande statue retraçant l’histoire de la Colombie, et ses sièges d’entreprises.
Nous passons ensuite par le Parc des Lumières, une place qui s’éclaire de nuit mais qui a mauvaise réputation après 19h. Autant vous dire qu’on n’est pas retournés voir les lumières !
Dans les rues, les vieux bâtiments cotoient les buildings construits ces dernières années, dont un qui a une forme d’épingle.
Nous arrivons à la partie qui fut notre préférée : le square Botero, à côté du musée du même nom.
Botero est un des plus fameux peintre et sculpteur contemporain de Colombie. Sa signature artistique ? Déformer les corps pour en faire des sujets obèses.
Nous en reparlerons si nous visitons le musée de Bogota dédié à son art ! En attendant, voici quelques sculptures exposés devant le Palais de la culture.
Ce dernier a été conçu par un architecte belge dans un style néo-gothique. Mais à cause de la crise économique et du retour du Belge dans son pays, seulement un quart du bâtiment a été construit, au début du 20ème siècle. Il a été fini en 1970 mais le style initial a complément changé. Par exemple, les vitraux initialement prévus ont fini en vitres quelconques et les murs bicolores ne sont présents que sur la moitié du bâtiment.
Aujourd’hui, il accueille un musée, diverses expositions, et une libraire. Comme l’extérieur, l’intérieur est un vrai fourre-tout !
Nous passons ensuite dans des ruelles spéciales shopping, bondées, au niveau de vigilance de 4/5.
En Colombie, un célèbre dicton nous est répété partout : « No dar la papaya ». Mot à mot : « Ne pas donner la papaye », c’est à dire, ne pas montrer ses richesses pour ne pas être volés.
Tout est donc rangés dans nos sacs, surveillés de près.
Nous traversons ensuite le « labyrinthe », un immeuble qui renferme de nombreuses boutiques de contrefaçons.

Notre dernière étape : le parc San Antonio. Cette place, peu fréquentée est dangereuse. Selon Julio, moins un endroit est fréquenté à Medellin, plus il est sujet à des vols violents avec armes. Dans les lieux plus fréquentés, on ne risque presque « que » le vol des pickpockets.
Nous voilà une nouvelle fois bien rassurés !
Nous n’étions pourtant pas craintifs en arrivant à Medellin. Et les gens alentours paraissent plutôt intrigués par notre groupe, nous saluent, et discutent avec le guide.
Cette place a connu un bombardement en 1995 tuant une vingtaine de personnes (le criminel n’a jamais été identifié). Pour l’anecdote, une sculpture d’oiseau de Botero a été fort endommagée par la bombe et Botero n’a pas voulu que celle-ci soit bougée. Il a refait la même à côté en symbole de renouveau. Un beau geste ! Entre les 2, l’arricle du journal de l’époque a été affiché en guise de mémorial.
Nous retournons au métro où le tour prend fin. Nous remercions Julio pour ces précieuses informations et rentrons à l’hôtel en début de soirée, sans trop traîner (on ne va pas jouer avec le feu !).
Nous préparons de bonnes pâtes au roquefort trouvées au supermarché et dégustons un petit Saint-Nectaire pour fêter nos 7 ans et notre amour commun pour le fromage.
Le lendemain, 13 juin, nous partons dans la matinée pour Guatapé.
Métros jusqu’au terminal du Nord puis 2h de bus qui nous dépose au pied du rocher « El Peñol ».

De nombreuses boutiques à touristes s’accumulent ici et nous sommes interpelés de toute part.
Nous grimpons à la file indienne les plus de 700 marches aménagées pour atteindre le sommet et avoir une vue 360 degrés sur le lac de Guatapé, qui sert de barrage. Un peu de sport, ça nous manquait !
Aujourd’hui, de multiples îlots qui sortent de l’eau de manière surréaliste sont aménagés avec des activités de plein air, et même parfois habités.
Il ne fait pas très beau aujourd’hui mais la vue est tout de même sublime.
Avant de redescendre, on se laisse tenter par une bière à l´ananas. Malheureusement, la tradition veut que le bord du verre soit recouvert de sel ! Morgan, qui apprécie bien, finit ma part.
Nous redescendons ensuite, quelques courbatures dans les jambes pour reprendre le bus et s’arrêter un peu plus loin au cœur du village de Guatapé.
Et c’est un véritable coup de cœur immédiat ! Tout est calme et les bâtiments sont gaiement colorés.
Nous promènerons toute l’après-midi dans les petites ruelles et irons manger une crêpe dans un restaurant français.
A 16h, alors qu’on vient juste de se mettre de la crème solaire pour nous protéger d’un soleil monstrueux, une grosse pluie fait une soudaine apparition, nous obligeant à courir pour rejoindre l’arrêt de bus. 15 minutes plus tard, nous grimpons dans un vieux bus pour rentrer à Medellín.
Nous mettrons 3h cette fois-ci à cause des bouchons à l’entrée de la ville.
Nous rejoignons l’hôtel, nos 11km dans les jambes nous ayant bien fatigués.
Le 14 juin, nous nous levons avec un beau soleil pour accompagner notre dernière journée à Medellin. Au programme, la visite du quartier de la Comuna 13.
Mais avant cela, nous prenons le téléphérique qui survole la ville, et surtout de nombreux bidonvilles.
Cette partie de la ville est très vallonnée et on se demande comment les habitants font pour faire ces montées-descentes tous les jours...
Nous arrivons aux portes de la Comuna 13 (une Comuna est une zone de la ville), et apercevons déjà les multiples tags qui attirent aujourd’hui des milliers de touristes. Nous nous faisons accostés par de nombreux guides locaux qui proposent de nous faire faire le tour du quartier. Nous déclinons et préférons marcher au gré de nos envies parmi les petites ruelles aux mille couleurs.
[Pour résumer, le conflit armé des années 1960 - qui opposait les FARC, groupe terroriste d’idéologie marxiste, et l’armée du gouvernement - a fait fuir de nombreux paysans dans les hauteurs de la ville, où des bidonvilles sont apparus. De part sa géographie stratégique, la Comuna 13 est devenue en quelque sorte un QG des FARC, qui en firent l’un des quartiers les plus violents et dangereux de Colombie.
C’est seulement en 2002 qu’il fut encerclé par l’armée, aidé des milices paramilitaires nationalistes pour éliminer les FARC, donnant lieu à une guerre urbaine prenant à parti de nombreux civils.
Puis, ces milices ont entrepris un « lavage social » en tuant les civils suspectés d’avoir un lien avec les FARC. C’est encore le chaos durant quelques années supplémentaires.
A la fin des années 2000, le quartier est apaisé et les jeunes commencent à renouveler les bidonvilles grâce aux tags et au Hip hop. Le métro, téléphérique et l’escalator présents ici ont également joué un rôle important dans sa transformation et la sortie de son isolement.]
Vous l’aurez compris, cette zone est chargée d’histoire(s). Et ce sont les tags qui racontent la violence et la paix, le passé et le changement.
Très émouvants, riches, et vivants !
On y trouve également de nombreuses petites boutiques, des galeries d’art, des cafés, etc. Un incontournable pour étrangers et locaux !
En début d’après-midi, nous nous rendons au « Musée de la mémoire ». Ce gros bâtiment tout gris n’est pas très chaleureux mais l’intérieur est tout neuf et très innovant. Nous y croisons seulement quelques jeunes.
Nous espérions avoir des informations sur l’histoire de la Colombie et nous avons été déçus. Il s’agit plus d’un musée d’art moderne avec des œuvres abstraites sur la violence. Il y a bien un gros tableau numérique qui raconte date par date les gros événements des dernières années mais pas plus d’explications que ça, et surtout, le nom d’Escobar n’est mentionné nulle part.
Alors tabou ou pas tabou ?
Nous retournons à l’auberge manger un bout et partons vers 15h pour nous rendre à l’aéroport.
Ce soir pas de bus, mais un avion qui nous fera gagner plus d’une dizaine d’heures pour rejoindre la côte Nord !
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